dimanche 18 mars 2007

LA CITE INTERDITE de Zhang Yimou (2006)

Le cinéma est décidément un milieu peuplé d'escrocs. Tandis qu'un Michael Bay réussit l'exploit de dévoiler le contenu de ses métrages dans une simple bande-annonce, Zhang Yimou est capable de vous refourguer une 205 rouge en vous faisant croire qu'il s'agit d'une Ferrari Testarossa. A y regarder de plus près, ses deux derniers Wu Xian Pian bien qu'handicapés par un propos douteux ( Hero qui glorifie la tyrannie de l'empereur sur un script grugeant allègrement le Rashomon de Akira Kurosawa) ou un scénario anémique ( Le Secret des poignards Volants qui prend souvent la pose), parvenaient tout de même à émerveiller le spectateur grâce à ses couleurs flamboyantes, ses combats parfaitement corégraphiés, ses costumes grandioses, un score magnifique et une photo ultra esthétique capable de rendre la vue à n'importe quel joueur du PSG. D'une certaine façon, la forme (impressionnante) faisait amplement oublier le fond (quasi inexistant).

Avec La Cité Interdite, le réalisateur chinois continue sur sa lancée (amorcée par Ang Lee en 1999 avec Tigre et Dragon dont la réussite artistique était totale sur tous les tableaux), avec cette fois-ci, l'optique de rendre le contenu aussi beau que l'emballage. Les premières images du film confirment pourtant qu'en matière d'orfèvrerie Zhang Yimou est décidément plus à l'aise avec la confection de l'écrin qu'avec celle du joyau supposé y être contenu. Certaines longueurs se font rapidement sentir, le scénario peine à se dessiner malgré une histoire plutôt convenue (bien qu'intéressante) tandis que les acteurs semblent s'ennuyer autant que le spectateur, a l'exception d'une Gong Li (Mémoires d'une Geisha, Miami Vice) à nouveau impeccable. L'époque d'Epouses Et Concubines semble alors bien loin pour son auteur malgré des intentions louables et une volonté de dynamiser son film avec une première scène d'action pourtant aussi vaine que inapropriée malgré ses qualités chorégraphiques indéniables.

Heureusement, après une première partie plutôt soporifique le ton du film change radicalement lorsque les sous-intrigues, rapidement prévisibles, apparaissent en même temps qu'une scène d'action tout bonnement ébouriffante. Cette attaque nocturne portée a partir des montagnes est à couper le souffle autant dans sa réalisation (hyper dynamique et, chose peu commune dans le genre, très originale) que dans sa tension étouffante. Et le film de commencer alors à nous montrer ce que sait faire de mieux Zhang Yimou: soin esthétique exacerbé, personnages maudits tout droit sortis d'une tragédie grecque, le tout aspiré par un souffle épique ravageur. Et ce, jusqu'à ce final étourdissant et oppressant qui emprunte autant à ses derniers films qu'à Les Deux Tours du maître-étalon en la matière, Peter Jackson (l'ombre du "Gouffre de Helm" se faisant sans cesse sentir).

On arrive alors à pardonner volontiers au réalisateur le démarrage laborieux de son film et ne retenir que la force émotionnelle et incoercible de ces dernières images renversantes. Car au final, Zhang Yimou apporte enfin ce qui manquait cruellement a Hero et au Secret Des Poignards Volants: une âme et de l'émotion.

8/10

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